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desserts, et mille autres choses encore que j’oublie en ce moment. »

Et en récitant cette longue litanie, la femme de charge examinait à la dérobée sa jeune maîtresse, qui paraissait tout alarmée, et flottait indécise entre son avarice et sa gourmandise.

« Ceci est assez important pour que j’y réfléchisse, Barnes ; mais, pour ce soir, vous m’aurez un rôti d’agneau, avec une excellente sauce bien assaisonnée, une bonne tarte à la crème, un petit plat bouilli ; rappelez-vous aussi que je veux de ce pain d’épices que vous m’avez donné hier. Je l’aime infiniment, et je désire en manger à tout propos.

— Je suis désolée de dire à madame qu’elle a vu hier tout ce qui me restait de ce que notre bon maître M. Thorpe avait fait venir à Noël. »

L’héritière lança des regards courroucés à sa femme de charge, mais reprit après une assez longue hésitation :

« Alors envoyez votre liste à ce marchand : car il serait violent qu’avec ma fortune je ne pusse pas manger ce que j’aime et ce qui convient à ma santé. Mais rappelez-vous aussi, Barnes, que vous ne devez servir de ce pain d’épices excellent que lorsque je serai seule à table ou quand j’aurai du monde, j’entends du beau monde, ce qui arrivera assez rarement cette année-ci. Vous me comprenez bien, n’est-ce pas ?

— Très-bien, madame, » répondit la femme de charge ; et, fermant la porte, elle laissa sa maîtresse réfléchir sur les avantages qu’elle pourrait retirer de l’addition du manoir de Temple à sa terre de Combe.