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Qui rapproche soudain les globes dans l’espace
Et les cœurs sur ce globe, et, chaînon merveilleux,
D’un soleil qui passait cette étoile qui passe,
Et du feu des yeux noirs la douceur des yeux bleus ;

Et qui joint, par-dessus ou par delà les tombes
— Quand les prières sœurs aux vols purs et fervents
Dans les cyprès en deuil passent, blanches colombes —
À la tribu des morts la tribu des vivants.

Oh ! de cet amour, sois comme le tabernacle ;
Et pareil au candide et simple enfant de chœur
Chargé d’entretenir la lampe du cénacle,
Ne laisse pas mourir la lampe de ton cœur.

Ne laisse pas s’éteindre, aède, sous ta robe,
Ton culte pour le Droit qu’opprime en vain le fort ;
Garde ta conscience immaculée et probe ;
Sois un prêtre de l’Art,… mais du Juste d’abord.

Crois-moi, ce virtuose indifférent au Juste
— Fût-il triomphateur et fût-il éclatant, —
N’est pas le messager de la parole auguste
Qu’un nouveau monde, au seuil d’un nouveau siècle attend.

Celui-là seul vraiment sera l’élu des âmes,
Qui descendra des cieux comme un cygne idéal,
Non pour tremper son aile aux souillures infâmes,
Mais pour mieux nous guérir sachant mieux notre mal.