Page:Trois petits poèmes érotiques - La foutriade, La masturbomanie et La foutromanie, 1828.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
125
LA FOUTROMANIE

Il habitait dans le Temple de Gnide :
Et ce penseur, Rousseau le Genevois,
Sophiste habile, étrange misanthrope,
Dont les travers ont étonné l’Europe,
Contre l’amour, en travaillant des doigts,
En le lardant d’une vaine apostrophe,
Pour cent beautés vit lever son anchois.
L’ardent auteur des Lettres d’Héloïse
Des voluptés ne peut être ennemi ;
Sa plume brûle, on voit la paillardise
Se déceler dans son caustique écrit.
Eh ! qui ne sait que l’écrivain d’Émile
Pour sa servante éprouva de beaux feux,
Qu’imitateur des faiblesses d’Achille,
Sa Briséis le rendit amoureux ?
Errant tous deux de montagne en montagne,
Traînant partout sa soumise compagne,
Rousseau prouva qu’en l’amoureux assaut,
A bien compter, le sage n’est qu’un sot.
A le combler quand les plaisirs s’empressent,
La raison fuit, les motifs disparaissent,
Et, tout pesé, la vertu n’est qu’un mot,
Qu’un masque usé dont personne n’est dupe.
De son plaisir chaque mortel s’occupe,
Met tout son art à parer son destin,
A se forger un sort doux et certain.
De Marmontel lisez le Bélisaire,
C’est un modèle, un chef-d’œuvre moral ;
Mais apprenez qu’il aima d’Aubeterre,
Qu’il fut fidèle au tribut animal.
Vive Dorat ! poète foutromane,