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et si tous avaient agi comme eux, ils n’en seraient pas là aujourd’hui

— Quelle honte pour le pays ! reprenait un autre.

— Ils mourront sans peur comme ils ont combattu ajoutait un troisième. Mais le sang des martyrs est fécond, et un jour ils seront vengés.

— Encore s’il eût été possible de les délivrer par un coup de main. Mais non ! les bourreaux ont bien pris leurs mesures, et rien ne peut plus les sauver.

— Avez-vous assisté au procès, voisin ? Pas un d’eux n’a faibli un moment devant les juges. Rien n’a pu ébranler leur courage, ni la certitude d’une condamnation, ni les tortures de leurs cachots.

— Quelles monstruosités ont été mises au jour ! On eût eu plus d’humanité pour des assassins et des parricides. Ah ! Sir John Colborne s’entend au métier de geôlier.

— Il fait les choses en grand. N’a-t-il pas entassé dans les prisons, sans autre motif, tous ceux dont les opinions étaient dénoncées par quelques vils délateurs, misérables intéressés par vengeance ou spéculation à les faire incarcérer. El cela au mépris de toute légalité.

— Légalité ! s’écria quelqu’un. Il s’agit bien de cela ! Tout le monde sait que l’insurrection elle-même n’a été déterminée que par des warrants pour haute trahison, lancés après l’assemblée de St. Charles sans qu’aucun over-act eût été commis. Les patriotes ont-ils fait autre chose que s’opposer à la mise à exécution de ces warrants ? Et n’était-ce pas leur devoir de repousser ces monstrueuses illégalités ? Que le sang versé retombe donc sur la tête de ceux qui l’ont fait répandre.

— Toute chose aura son temps, et ceux qui échapperont au tribunal des hommes auront un jour de terribles comptes à rendre au tribunal de Dieu !

— Vous avez raison, monsieur ; car il n’est pas de meurtre si bien caché, pas de tortures si bien ensevelies entre les murs d’un cabanon que Dieu ne voies.

— Pauvres martyrs ! Exposés sans pitié au froid, aux privations, de toute espèce, même de nourriture suffisante, aux infections de la malpropreté, aux maladies…

— Et la mort au bout de tout cela !

— La mort, si l’on peut les convaincre d’un acte de rébellion. Sinon une longue captivité sans cause, et puis une liberté tardive, quand la prison a amené la ruine de leur fortune et le délabrement de leur santé.

— Et c’est ainsi que les Anglais se vengent sur ceux qu’ils tiennent en leur pouvoir, de l’évasion des autres qui ont trouvé un refuge sur les terres libres de l’Union Américaine.