Page:Trobriand - Le rebelle, 1842.djvu/12

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ché. — Hurrah ! Vivent les patriotes, et que les loyaux soient damnés ! — Arrêtez ! arrêtez !

La porte s’ouvrit tout-à-coup, et le jeune Denis Mac Daniel s’élança dans le vestibule où trouvaient sa sœur et Laurent.

— Mon frère ! — Denis ! — Ces deux cris partirent à la fois.

D’un coup-d’œil, Laurent embrassa tout ce qui venait de se passer, L’imprudence fatale du jeune homme, et le danger imminent qu’il courait.

— Par ici, par ici, dit Alice en s’élançant avec lui par un escalier dérobé. Arrivé aux premières marches, Denis se retourna vers Laurent qui le regardait.

— Je réponds de tout, dit ce dernier, mais fuyez !

— Fuir ! reprit fièrement le jeune Irlandais. Il revint sur ses pas.

— Ouvrez ! ouvrez ! criait-on au dehors.

— Viens ! au nom du ciel ! s’écria Alice.

— Allez ! dit Laurent d’une voix suppliante.

— Je ne fuirai pas ! reprit Mac Daniel avec une intrépidité résolue. Vous pourrez voir, Monsieur de Hautegarde, si le cœur d’un fidèle sujet de Sa Majesté se trouble aux aboiemens de vos traîtres patriotes.

— Brisons la porte ! criait-on ! — Qu’on cerne la maison !

Bientôt les murs furent ébranlés par des coups violents et répétés. Le danger augmentait de moment en moment, lorsque Laurent prit résolument la clé de la porte fermée, traversa la chambre voisine, et s’élança sur l’appui de la fenêtre au moment où un des assaillant se disposait à l’escalader du dehors.

Laurent de Hautegarde était un fier jeune homme de vingt-quatre ans environ, hardi, entreprenant, d’une intelligence élevée et d’une instruction solide. Son caractère franc et déterminé se peignait admirablement dans son maintien habituel, son port de tête, et les traits de son visage assombris un peu par la ligne noire et droite de sourcils sous lesquels, quand il s’animait, brillait comme un éclair le regard fauve de ses grands yeux.

— Holà ! qu’y a-t-il, vous autres ?

Son ton d’autorité fit aussitôt cesser le tumulte.

— Il y a, répondit un homme au parler rude, qu’un chien d’Anglais a coupé la corde où était pendu le gouverneur, et s’est réfugié à l’instant dans cette maison.

— Après ? dit Laurent en passant ses deux jambes en dehors.

— Après ? reprit l’orateur de la troupe. Eh bien ! nous voulons le punir de son insolence. Qu’on le livre, ou nous saurons bien le prendre.

— Oui-dà ! s’écria Laurent en s’élançant d’un bond au milieu du rassemblement. Êtes vous fous de venir ainsi attenter à la propriété,