fatigue, quand ils firent la rencontre d’un indigène. Celui-ci les conduisit à Kerkaroum où ils connurent enfin, à la joie des habitants, qu’ils se trouvaient dans l’Arabie heureuse.
Tous ces Arabes étaient en proie à une douce allégresse. Ils parcouraient les rues en sautillant et, faisant claquer leurs doigts, ils s’écriaient : « Bath ! Bath ! »
Roger, qui savait la langue du pays, demanda à un Arabe : « Pourquoi êtes-vous tous si contents ? »
Et l’Arabe répondit : « Parce que nous sommes dans l’Arabie heureuse. »
25 mars. — Avant de quitter Kerkaroum, ils firent visite à l’iman du pays. C’était un quinquagénaire de haute taille, dont la barbe était noire et drue et les sourcils rasés.
Il était très vénéré et réputé pour sa science. Il avait dix-huit femmes et plus de trois cents enfants. Mais il ne s’était pas contenté d’engendrer ses enfants sottement et sans méthode, ainsi qu’agissent la plupart des imans de l’Arabie heureuse. Il avait dressé des tableaux méticuleux, où figuraient l’âge, la hauteur, le tour de taille de ses femmes, leur poids aux différentes époques de la gestation, l’indication de leur tempérament, de leurs habitudes, de leur régime alimentaire.
Il avait également dressé d’autres tableaux relatifs au poids et à la taille de ses enfants aux différents âges de la vie. Il se livrait à d’instructives comparaisons sur les enfants consécutifs d’une même mère, et sur des enfants engendrés à la même époque par le même père et conçus par des mères diverses.
Sa principale sagesse consistait d’ailleurs à ne tirer aucune déduction de ces observations, si passionnantes à recueillir.
29 mars. — Quittant Kerkaroum, les voyageurs gagnèrent Kerkabèh, où ils furent reçus princièrement par un vieil iman vénérable, et où les attendait la plus curieuse aventure de leur voyage.