De vrai, quelque rustaud, natif de Barbizon,
Son esprit fût-il mort et sa verve tarie,
Eût moins vulgairement plaisanté l’otarie
Ou nargué le morne bison.
Ils vinrent jusqu’au parc où Girafe, ma mie,
Hausse son chef pensif et plein de bonhomie.
« Oh ! le sot animal ! Mais à quoi donc sert-il ? »
Clamèrent d’une voix ces esprits terre-à-terre.
Argument vraiment peu subtil
Et bassement utilitaire.
La girafe au long col ne leur répondit rien.
Poursuivant leur chemin, les deux grossiers compères
S’égayèrent encore aux dépens d’un saurien
Et de trois paisibles vipères.
Un perroquet ensuite excita leur humour.
Puis, à la fin, ce fut le tour
De sir Jack Kanguroo et de dame Sarigue.
Ce flot d’absurdités sans digue,
Même pour un indifférent,
Était tellement écœurant
Que dame Autruche, oyant cette racaille,
Vomit le démêloir d’écaille
Et le trousseau de clefs qu’elle allait digérant.
Le soir amène enfin la trêve.
Pour rentrer au logis, le couple s’en alla.
Or, il advint, qu’à quelque temps de là,
Le syndicat vota la grève.
Cocher et conducteur, contrôleur et côtier,
Chacun se souleva. Descendant de son coche,
Le cocher dignement rendit son fouet altier
Et le conducteur sa sacoche.
Page:Tristan Bernard - Contes de Pantruche.djvu/63
Cette page a été validée par deux contributeurs.