scruter le vrai et le faux à travers les indiscrétions, presque toujours fidèles, de la petite baronne.
Ce fut vers dix heures du matin que le premier coup de canon se fit entendre. Aussitôt des paris s’engagèrent.
On savait l’armée ennemie supérieure en nombre. Un vieil officier chilien, très connaisseur, déclarait, en donnant ses pronostics, que les positions occupées par l’archiduc étaient formidables. Mais on avait confiance dans les qualités stratégiques de Vendangeur, et, offerte primitivement à trois contre un, son armée finit, très soutenue, à 7/4.
Un gros parieur, un marchand de bois de la Haute-Marne, nommé Gobourg, arriva à ce moment sur la terrasse du moulin. Un hasard lui avait fait rencontrer sur son chemin, un espion, un transfuge de l’armée ennemie qui, pour cinquante louis, lui avait vendu un avis secret, un « tuyau » merveilleux : l’archiduc Franz avait dégarni ses positions du village de Fligney, que Vendangeur croyait très fortement occupé. Un fort contingent avait abandonné Fligney pendant la nuit et opéré un mouvement tournant qui devait l’amener sur une position mal défendue du général Vendangeur.
Cette manœuvre allait décider du sort de la bataille.
Gobourg se prépara donc à ponter ferme l’armée de l’archiduc. Il avait sur lui quatre-vingt mille francs. (En ces temps troublés, les paris se réglaient au comptant.)