Le Collectionneur
I
Un matin d’avril, mon ami Lartilleur adopta un enfant de quelques mois. Il se trouvait dans les conditions légales, n’ayant pas d’enfant vivant.
Puis, il se dit : « Maintenant que j’ai un enfant adoptif, ne serait-il pas bon que j’eusse également un enfant naturel ? » Il en toucha deux mots à une modeste ouvrière, sa voisine de palier. Elle lui donna, le terme accompli, un enfant naturel, qu’il alla reconnaître à la mairie.
Après le baptême, il rentre chez lui tout soucieux : « J’ai bien, pensait-il, un enfant adoptif et un enfant naturel, mais je n’ai pas d’enfant adultérin.
« Au fait, acheva t-il, mon notaire n’est-il pas marié ? Si je me faisais présenter à sa femme ? »
Ce qui fut dit fut fait. Il fut bientôt en bons termes avec la notairesse.
Un soir, comme il dînait chez ses parents, il eut, après le potage, un sursaut. « Sapristi ! se dit-il en lui-même, je n’ai pas d’enfant incestueux ! » Justement, il lui restait encore une sœur non mariée, et il put se procurer à peu de frais un enfant parfaitement incestueux, qui n’était pas adultérin.