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textuelle : « Ce n’est pas dans mes habitudes de faire des affaires avec des personnes sans chapeau. »

Il remonta dans sa voiture et se fit conduire chez son chapelier qui l’accueillit sans étonnement.

Arabin se dit : « Il n’a pas reçu de lettre d’enterrement. »

Ce n’était pas exact. Le chapelier avait bien reçu un faire-part, que lui avait fait envoyer le domestique de Pierre ; seulement, en voyant Arabin, il s’était dit simplement : « Ce n’est pas lui qui est mort ; ce doit être un de ses parents. »

Le chapelier était pressé. Il avait décidément des favoris trop sérieux pour être disposé à écouter des histoires extraordinaires. Arabin lui fit donc un récit banal d’une bousculade sur le boulevard où il avait perdu, disait-il son chapeau. Le chapelier lui choisit un beau haut de forme. Puis il lui dit, songeant au parent mort :

— Je vais vous mettre un crêpe.

Arabin, un peu ahuri, ne protesta pas. Le chapelier le coiffa d’un chapeau à large crêpe. Il se trouva ainsi porter son propre deuil. Ce qui l’attrista profondément.

Il trouva ensuite un joaillier, qui lui donna deux cent cinquante francs pour sa bague.