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Si vous aviez un peu de foi, disait le Christ, si vous en aviez seulement gros comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : Ôte-toi de là, et la montagne vous obéirait.

Est-ce que l’industrie n’a pas réalisé de plus grands prodiges, elle qui n’a de foi que pour l’argent et pour elle même ?

Voyez-vous l’industrie, aidée du génie de l’homme, et soutenue par sa foi en un avenir de richesse, faire bouillonner la vie dans les flancs du métal échauffé, et dire à ses coursiers de fonte : Hennissez et marchez !

La nature vaincue pousse un cri d’effroi ; le monstre de métal siffle épouvanté et comme indigné d’obéir ; au bout de sa trompe de fer, ses naseaux rougissent et étincellent ; il jette au vent souffle sa longue et blanche crinière de fumée : il souffle avec furie et s’anime peu à peu : il s’élance, entraînant après lui toute une cité roulante. L’air, violemment déchiré, tourbillonne autour de lui comme une tempête et voilà les horizons qui tournent, les montagnes qui se déplacent, les collines qui s’enfuient, les arbres qui dansent en rond et semblent exécuter des marches militaires… Puis, plus près tout est confondu dans un sillage rayé de couleurs vagues et changeantes… Les corps ont disparu : tout n’est plus qu’une il-