Page:Tristan - L’émancipation de la femme, 1846.pdf/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.
43

le doux Abel saura travailler sous la protection de son frère.

Alors les paroles suaves d’Abel régénéreront l’âme de Caïn, et il y aura un échange d’intelligence et de vigueur, de résignation et de courage.

Alors le génie de l’homme s’adoucira en s’unissant étroitement à celui de la femme, et ce grand mariage moral, qui n’a pas été accompli encore, renouvellera la face du monde.

Car maintenant Caïn et Abel sont encore ennemis et changent alternativement de rôle.

Et cette guerre impie sépare l’homme de la femme comme elle sépare la raison et la foi, la religion et la philosophie, Dieu et la liberté !

Ainsi le cœur de l’humanité est séparé en deux, et par cette violente déchirure tout son sang s’écoule et s’en va.

Et l’on ne veut pas comprendre que Caïn et Abel sont les deux enfants de la même mère et qu’il faut à la société le soutien de ses deux enfants.

On ne voit pas que, si l’homme est le chef ou la tête de l’association, la femme en est le cœur et la vie.

On craint d’avouer que la raison sans foi est aussi stérile qu’une pensée sans amour, que la religion est la philosophie du cœur et que Dieu ne peut être servi que par des hommes libres.