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alors l’intelligence aimante devient mère d’un fruit qui s’agrandit toujours sans jamais sortir du soin qui le limite toujours, et ce fruit qui est l’univers est pour cela nommé l’embryon divin.

Le principe se reproduit dans ses effets, et Dieu se manifeste dans l’humanité ; le principe créateur, l’amour intelligent devient la femme : la force est représentée par l’homme ; l’homme n’est donc que l’argile de Prométhée, et c’est la femme qui a reçu le feu sacré du ciel pour l’animer.

Aussi Flora n’accorde-t-elle pas à l’homme le titre de père. Selon elle, l’humanité figurée par le Christ n’a qu’une mère sur la terre et un père dans le ciel. La femme, maîtresse de ses faveurs, anime qui il lui plaît du feu sacré de l’amour, et celui qu’elle a choisi, elle le fait participer un instant à son privilége de mère. Elle ne se donne jamais à un homme, mais elle honore un homme de son choix, l’élève jusqu’à sa souveraine et le renvoie en lui imposant silence. Ainsi Flora ne réclame pas l’émancipation, mais bien la souveraineté et l’autocratie de la femme ; son utopie est la république des abeilles, et ce qu’elle paraît vouloir conquérir au nom du sexe le plus aimable et le plus opprimé, ce n’est pas l’égalité et la justice, c’est la réaction et la vengeance. Flora Tristan a beaucoup souffert.