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Septentrionale, entre le Fleuve de S. Laurent & la nouvelle Angleterre. Elle a environ cent lieues d’étendue. Les Anglois la céderent aux François par la paix de Bréda en 1667. La France l’a rendue à l’Angleterre par celle d’Utrècht, en 1713.

ACAJA, autrement, Ibametara. C’est un des plus grands arbres du Bresil, dont Pison parle, l. IV. c. 16. & qu’il distingue de l’Acajou dont il avoit parlé, c. 6. Il paroît cependant que ce n’est qu’une espèce de l’Acajou ; car il appelle aussi cet Arbre Acaja iba, comme celui-ci.

ACAJOU, sub. m. Arbre d’Amérique de la hauteur de nos pommiers, branchu & chargé de beaucoup de feuilles. L’écorce de son tronc est ridée & cendrée. Son bois est rougeâtre, ses feuilles sont sèches, fermes, luisantes, arrondies, & ont cinq pouces de longueur sur trois de largeur. Les extrémités de ses branches se terminent par un bouquet de fleurs panachées de rouge & de verd, d’une seule pièce taillée en entonnoir. De plus de cent fleurs qu’il y a quelquefois sur un bouquet, il n’y en a que trois à quatre qui nouent ; c’est le pistille de la fleur qui devient un fruit de la figure d’une poire grosse comme un œuf d’oie, qui en mûrissant est tantôt rouge, tantôt jaune, & tantôt également teint de ces deux couleurs, & dont la grande acreté diminue à mesure qu’il mûrit. De l’extrémité de ce fruit pend une semence ou amande bonne à manger, revêtue de deux écorces, dont la première est gris de souris, & l’autre brune, entre lesquelles est contenue une liqueur huileuse, très-caustique, & dont on se sert en Amérique pour emporter les dartres & faire tomber les cors des pieds. Le suc de cette poire, qui soutient la semence, quand il est nouvellement exprimé, est blanc, laiteux, & d’une acreté si grande, qu’il prend à la gorge, & qu’on ne peut le boire qu’après qu’il a fermenté & qu’il s’est éclairci ; pour lors il est agréable, & a le goût du vin. Il coule du tronc de l’Acajou une gomme pareille à celle qu’on nous apporte du Sénegal ; mais elle est en plus gros morceaux ; elle se fond dans l’eau comme la gomme Arabique. Thevet, Pison, & la plupart des Voyageurs nous ont parlé de cet arbre.

Il y a d’autres arbres qu’on nomme dans les Isles d’Amérique Acajou rouge, Acajou blanc, Acajou à planches, Acajou à canot ; mais le caractère de ceux-ci ne nous est pas si connu. Monsieur Louvillers de Poinci, dans son Histoire naturelle des Antilles, le décrit plus exactement & différemment de ceci. Voici ce qu’il en dit. Il y a trois sortes d’arbres qui portent le nom d’Acajou. Mais il n’y en a qu’un qui porte du fruit. C’est un arbre de moyenne hauteur, qui panche ses branches jusques à terre. Ses feuilles sont belles & larges, arrondies par-devant, & rayées de plusieurs veines. Il porte des fleurs qui sont blanches, lorsqu’elles s’épanouissent nouvellement ; puis après elles deviennent incarnates, & de couleur de pourpre. Elles croissent par bouquets, & elles exhalent une très-douce odeur. Ces fleurs ne tombent point jusqu’à ce qu’elles soient poussées par une espèce de chataigne faite en forme d’oreille, ou de rognon de lièvre. Quand cette chataigne a pris son accroissement, il se forme au-dessous une belle pomme longuette, qui est couronnée de cette crête, qui devient en mûrissant d’une couleur d’olive, pendant que la pomme se revêt d’une peau délicate & vermeille au possible. Elle est remplie au-dedans de certains filamens spongieux, qui sont imbus d’un suc tout semblable, doux & aigre, qui désaltère grandement, & que l’on tient être très-utile à la poitrine, & aux défaillances de cœur, étant tempéré avec un peu de sucre. Mais s’il tombe sur quelque linge, il y imprime une tache rousse qui demeure jusqu’à ce que l’arbre fleurisse de nouveau. Les Indiens font un breuvage excellent de ce fruit, lequel étant gardé quelques jours, a la vertu d’enyvrer aussi promptement que le meilleur vin de France. La noix qui est au-dessus étant brûlée, rend une huile caustique, de laquelle on se sert pour amollir & même pour extirper les cors des pieds. Si on la casse, on trouve dedans un pignon couvert d’une tendre pellicule, laquelle étant ôtée, est d’un très-bon goût, & a la vertu d’échauffer & de fortifier l’estomac. Cet arbre ne porte du fruit qu’une fois l’an, d’où vient que les Brésiliens comptent leur âge avec les noix qui croissent sur cette pomme, en réservant une par chaque année, laquelle ils conservent avec grand soin dans un petit panier qui n’est destiné qu’à cet usage. Si on fait une incision au pied de cet arbre, il jette une gomme claire & transparente, que plu-


sieurs ont prise pour celle qui vient d’Arabie. La semence de l’arbre est en la noix, qui produit aisément étant mise en terre.

Les autres Acajous sont des arbres propres à bâtir. On en fait cas à cause de leur hauteur & de leur grosseur si excessives, que les Caraibes tirent souvent d’un seul tronc ces grandes chaloupes, qu’ils appellent Pyranguës, qui sont capables de porter 50. hommes. Il pousse plusieurs branches fort touffues, & qui sont un ombrage fort agréable, & même quelques-uns tiennent qu’il contribue à la santé de ceux qui s’y reposent. Il y a deux sortes d’Acajou, qui ne diffèrent qu’en la hauteur de leur tronc & en la couleur de leur bois. Le plus estimé est le rouge, qui outre ce qui en a été dit ci-dessus est de bonne senteur, & fort facile à mettre en œuvre. Il ne se pourrit point dans l’eau. Les armoires qui en sont faites donnent une bonne odeur aux habits, & les préservent des vermines qui s’y engendrent, ou s’y glissent, dans les coffres d’une autre matière. Ces propriétés sont cause que quelques-uns ont cru que cet arbre étoit une espèce de Cèdre. On en fait de l’escente pour couvrir les maisons. L’Acajou blanc est semblable au dehors à l’Acajou rouge ; mais il n’est pas tout-à-fait si haut. Il est facile à mettre en œuvre, quand il est fraîchement coupé ; mais si on le laisse à l’air il se durcit en telle sorte, qu’on a bien de la peine à s’en servir. Il est sujet aux vers, & se pourrit en peu de temps. Si on fait une incision au pied de ces arbres ; ils jettent une grande abondance de gomme. Voyez aussi l’Histoire des Antilles du P. Du Tertre Tr. III. C. 4. §. 4. & C. 5. §. 6. & Pison L. IV. C. 6. Il l’appelle du nom que lui donnent les Sauvages, Acaja Iba.

ACALIFOURCHONNÉ, ÉE, adj. qui est à califourchon, terme bas & peu en usage. Le rustre s’étoit acalifourchonné sur mon cheval, & déja comme sien le talonnoit de bonne grace. Cyrano.

ACANGE. s. m. Excursor, Prædator, Velo. Espèce de soldat Turc, qui ne fait qu’aller en course pour butiner. Les Turcs les appellent Akingi, nom qui vient du mot Turc Akan, ou plutôt Akin, & signifie, Proie, butin, course. Meninski. Les Acanges sont des volontaires Turcs, qui ne reçoivent point de solde, & ne font la guerre que dans l’espérance du butin. Gratiani. Histoire de Chypre.

ACANTHE, ou ACANTE. s. f. Acanthus. On croit que c’est sur la figure du feuillage de cette plante que Callimachus, Sculpteur Athénien, a formé ces ornemens du chapiteau Corinthien. Les Botanistes modernes reconnoissent, avec Dioscoride & Pline, deux espèces d’Acanthe, dont l’une est sans épine, & l’autre en est armée. Celle qu’on nomme ordinairement Achante molle, a ses racines rougeâtres, longues, assez tendres & visqueuses. Ses feuilles sont grandes, larges, lisses, découpées assez profondément en plusieurs segmens, qui sont encore recoupés en de plus petits lobes, charnues, d’un verd obscur & luisant en dessus, & plus pâle en dessous. Entre ces feuilles s’élève une tige haute de trois à quatre pieds, de la grosseur du doigt, garnie vers sa partie moyenne de quelques petites feuilles, au dessus desquelles se forme un bel épi de fleurs, mais très-piquant ; chaque fleur est d’une seule pièce applatie & découpée par le haut en trois, retrécie & terminée par le bas en un tuyau court & en forme d’anneau. Quatre étamines chargées de leurs sommets tiennent lieu de la lèvre supérieure de la fleur. Le calice est formé par quelques feuilles, dont la supérieure est voûtée, & semble suppléer au défaut de la lèvre supérieure de la fleur, soit par sa situation, soit par une teinte de pourpre dont elle est colorée, & que les autres n’ont point. Le pistille qui s’élève du fond du calice & de la fleur, devient un fruit de figure d’un gland, & partagé en deux cellules, qui contiennent chacune quelques semences, applaties & jaunâtres.

L’Acanthe épineuse se distingue de la molle par ses feuilles plus finement découpées, & dont chaque segment se termine par un piquant assez roide & fort aigu ; le vert est aussi plus obscur. Ces deux espèces ne changent point par la culture, & l’une ne dégénère jamais en l’autre. On doit donc être très-assuré que ces deux espèces sont très-distinctes & très-constantes.

On appelle l’Acanthe, Branca ursina, branche ou branque ursine, à cause de la prétendue ressemblance de ses feuilles avec la patte d’un ours, & Branca hircina, à cause que ces mêmes feuilles se contournent en quelque façon comme les cornes


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