Page:Trevoux-1752-01-A-ANE.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2


que l'on sembloit en même temps désaprouver. Il est vrai que l'on a eu par-là intention de conserver les traces de l'ancienne ; mais d'un autre côté, c'étoit en quelque sorte laisser le choix de l'une ou de l'autre ; donner une espèce d'autorité à l'erreur, ou tout-au-moins jetter les Lecteurs dans l'embarras & dans le doute, en leur présentant comme indifférente une orthographe absolument proscrite. On avoit encore retranché tout-à-fait d'un grand nombre de mots les lettres doubles, ou d'autres que l'usage y a conservées, pour n'en pas laisser disparoître les étymologies grecques ou latines ; ou on avoit doublé sans aucun motif ni d'étymologie ni de prononciation, des lettres qui doivent demeurer simples.

Pour remédier à tous ces défauts & à tous ces inconvéniens dans la nouvelle Edition, on y a suivi pour l'orthographe l'usage le plus constant & le plus autorisé ; & on n'a pas cru pouvoir mieux faire dans cette vûe, que de se conformer exactement à celle qui vient d'être fixée par le nouveau Dictionnaire de l'Académie. On a supprimé le mélange plus bizarre qu'utile des grandes & des petites lettres, pour ne laisser que celles qui sont absolument nécessaires, & qui doivent s'écrire. On a rétabli les doubles lettres & les autres qui avoient été retranchées des mots où l'usage veut qu'elles subsistent, & on a simplifié celles qui avoient été doublées sans fondement. Mais pour conserver à ce Dictionnaire quelque chose de son ancienne forme, & pour ne pas y introduire un changement trop considérable & trop précipité, on y a laissé à leurs places une bonne partie des mots écrits comme ils l'étoient, avec des renvois à ceux où la bonne orthographe est observée ; en sorte qu'on les trouvera toujours, de quelque maniere qu'on les cherche, & que l'on sera averti en même temps que c'est l'orthographe des derniers qu'il faut suivre.

On a inséré dans les définitions & explications des mots beaucoup de corrections & de nouvelles observations, soit pour en donner des idées plus justes & plus précises, soit pour en faire connoître des sens & des significations dont il n'avoit pas été parlé. On a même ajoûté dans bien des endroits de nouveaux exemples tirés des meilleurs Auteurs anciens & modernes, qui ont pour objet, ou de confirmer les explications déja données, ou d'autoriser celles qui ont été ajoûtées, ou seulement d'apprendre quelque fait intéressant, quelque anecdote curieuse, ou quelque circonstance particuliere, qui peut contribuer à une intelligence plus parfaite du mot dont il s'agit. On n'a pas laissé échaper les occasions de donner des régles & des principes sûrs, pris de l'Académie ou des meilleurs Grammairiens, pour lever les doutes & éclaircir les difficultés qui peuvent naître sur certains mots, soit en ce qui regarde la prononciation, soit en ce qui regarde la conjugaison des verbes irréguliers,


les inflexions singulieres de quelques noms, ou les autres bizarreries de la Langue, sur lesquelles il est assez ordinaire d'être embarrassé ; & on s'est attaché, autant qu'il a été possible, à résoudre les difficultés par les décisions de l'Académie.

Mais ce ne sont là que les moindres avantages que l'on trouvera dans la nouvelle Edition du Dictionnaire de Trevoux. Quelque étendue qu'on lui ait donnée, on avoit cependant lieu d'être étonné d'y voir manquer un grand nombre de mots du bel usage, soit de ceux qui appartiennent au discours ordinaire, soit de ceux qui regardent les Arts & les Sciences, ou d'autres dont on n'a pas donné toutes les différentes significations.

Tous ces mots seront insérés dans la nouvelle Edition avec beaucoup d'autres qui ne se trouvent dans aucun Dictionnaire, & dont on a jugé que la connoissance ne pourroit être qu'utile au Public. La plupart ont été introduits & confirmés par l'usage depuis la derniere Edition du Trevoux. Les autres ont été recueillis de différens Auteurs estimés. Il y en a qui concernent la Physique ou l'Histoire naturelle, & qui donneront occasion d'en expliquer quelques effets curieux. Il n'y a guère d'Arts ni de Sciences qui n'en aient fourni de nouveaux. On a augmenté le nombre des mots du vieux style, sur-tout de ceux qui peuvent encore être employés dans certains genres d'écrits en prose ou en vers. On n'a pas négligé les mots que les modes ont mis en vogue, ni ceux qui doivent leur origine à certains évènemens & à certaines circonstances remarquables, ni ceux qui sont purement de conversation familiere, qui ne s'écrivent pas, & que l'on hazarde, pour ainsi dire, sans conséquence. On a cru devoir pousser l'attention jusqu'à donner un plus grand détail de ceux qui sont d'un usage commun dans quelques Provinces. Le Public est redevable de toutes ces additions à Mr. Restaut, à Mr. Valdruche & à plusieurs autres qui n'ont pas voulu être nommés.

En un mot, on n'a épargné ni soins ni recherches pour rendre ce Dictionnaire d'une utilité générale, & pour y rassembler tous les mors que toutes sortes de personnes voudront y chercher, en quelque matiere que ce puisse être. Le nombre de ceux qui y sont ajoûtés ne va guère à moins de 4000. sans parler des changemens & des corrections répandues dans le cours de l'Ouvrage. On peut juger par cette prodigieuse augmentation de l'avantage considérable qu'aura ce Dictionnaire, au dessus de tous ceux qui ont paru jusqu'à présent.