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72 LA PÉRIODE COLONIALE (1607-1764)

Selling of Joseph^ qui est peut-être le premier document anti-esclavagiste de l’Amérique.

Samuel Sewall (1652-1730), bien que né en Angleterre, prit ses diplômes à Harvard ; il appartient au type de la « caste brahmanique » et ne s’est jamais affranchi des traditions théocratiques dont il avait été nourri en vue des hautes situations qu’il devait par la suite occuper dans la magistrature et dans la politique. Il montre toutefois un esprit accessible au doute, par l’aveu public de son repentir pour le rôle qu’il avait joué dans la persécution des sorciers — et quel meilleur signe de progès intellectuel pouvait-il donner à cette époque ? En trois ans, il passa de la discussion de la moralité de l’esclavage à l’assertion de l’égalité des droits de tous les hommes, fils d’Adam. 11 prit aussi la défense des Indiens et son patriotisme trouva dans les Ecritures l’assurance que l’Amérique était destinée à devenir le siège de la nouvelle Jérusalem. Son recours h la prophétie biblique le rattache à la génération qui finissait alors, tandis que ses tendances humanitaires en font le précurseur d’un personnage qui ne consacrait guère ses loisirs à la lecture de l’Apocalypse — c’est-à-dire Benjamin Franklin.

Tout autant, peut-être, que Franklin, Sewall possédait la sagacité yankee et une absence naïve de sentiment ; ainsi le montre son journal, l’un des documents les plus intéressants et les plus précieux de la période coloniale. Ce journal englobe la plus grande partie de sa vie, et nous procure, ainsi que ses lettres, son livre de notes, et les résumés des sermons qu’il entendit, des matériaux qui nous permettent de reconstituer une très complète histoire sociale de la Nouvelle-Angleterre de son temps. Bien qu’il soit loin d’égaler l’immortel