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HISTOllIENS, CIÎITIQUES, PUBLICISTES 401

sauts et plus soutenus de Webster. Pourtant, depuis le jour, en 1837, où ce jeune patricien se leva pour la première fois au Faneuil Hall pour dénoncer les meurtriers de Lovejoy et les Bostoniens défenseurs de ce crime, jusqu’à celui, en 1881, où, prononçant un discours à Harvard, il dénonça la lâcheté morale si fréquente et si lamentable de la classe instruite, il n’y eut pas en Amérique d’orateur plus hardi, plus brillant ou plus esscnticllemment noble que Wendell Phillips. On est libre d’admettre qu’il fut un fanatique, que ses conseils, s’ils eussent été suivis, eussent conduit le pays h sa ruine, qu’il fut fréquemment injuste envers ses adversaires. Quel champion des idées nouvelles est sans exagération ?

Heureux encore ceux qui, dans leurs revendications, 

apportent l’éloquence et la sincérité de Phillips ! Qu’importe qu’il ait placé Toussaint Louverture au-dessus de George Washington ? Nous n’avons pas à le juger comme critique ou comme penseur, nous n’avons qu’à l’admirer comme une puissance dans la vie d’une nation.

Une puissance plus remarquable encore se manifesta vers la fin de notre période, puissance conservatrice, celle-là, émanant de l’Ouest démocratique et non plus de l’ancienne aristocratie de Boston. Abraham Lincoln est par lui-même une justification presque aussi complète de l’existence d’une littérature vraiment américaine que de la vitalité essentielle de la démocratie des Etats-Unis. Non qu’il ait été homme de lettres. S’il vivait encore il aurait sans doute mis fin par quelque rectification bien nette aux entreprises de monographies qui s’eflbrcent de lui assigner un rang bien déterminé parmi les auteurs américains. Lincoln justifie l’existence d’une littérature vraiment américaine parce qu’il semble impossible que

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