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358 LA PERIODE LOCALE (1830-1865)

de Mr. Knickerbocker, offrit au monde pour la première fois l’occasion de sourire ou de rire longuement des créations du génie fantasque d’un Américain. Mais quoique le livre d’Irving fût plein de l’exagération et du mélange de faux et de vrai que l’on considère souvent comme le caractère particulier de l’humour américain, Walter Scott n’eut pas tort de reconnaître les obligations des Américains envers les humoristes britanniques, puisque l’humour du Sketch Book et des œuvres postérieures d’Irving était celui de Goldsmith, à peu de choses près. Les autres auteurs du Knickerbocker, Paulding, Drake, Halleck, Sands, etc., bien que leur humour ne fût pas totalement importé, l’ont visiblement tiré, comme Irving, de leurs lectures ; si bien qu’il n’est pas inexact de dire que, jusqu’à quarante ans après la mort de Franklin, aucun humoriste aussi verveux que lui ne fit son apparition dans la littérature américaine.

Mais la jeune République grandissait en sagesse comme en population, et le caractère de Franklin devenait celui de ses compatriotes. Une nouvelle forme d’humour, ou si l’on veut une combinaison très fondue de ses anciennes formes, leur avait été léguée par lui — humour caractérisé par la finesse, par une exagération en accord avec les vastes proportions du Nouveau-Monde, par un mélange d’imagination et de faits positifs, de faux et de vrai, par un bon sens démocratique, une absence de subtilité qui le rendent intelligible pour tous. Il serait probablement téméraire de prétendre que chacun de ces caractères distingue l’humour américain de celui des autres pays. Il y a, dans les Mille et une Nuits, l’anecdote de deux adversaires qui « échangent des mensonges » devant un cadi avec une effronterie d’exagération que nul Américain ne pourrait surpasser. Quand les humoristes dont