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POÈTES ET KOMANC1EHS 3 :i9

lité de riiomiue et de la femme, du corps et de l’àme. Il fallait que ce complexe évangile s’olïVît au monde sons une forme littéraire — surtout puisqu’il s’agissait d’opérer de bas en haut — et sous une forme poétique, parce que la plus noble et la plus efficace. Mais la poésie ne devait emprunter ii l’ancien monde son stvle pas plus que son sujet ; elle devait éviter les formules reçues et banales. Walt passa réellement beaucoup de temps à les retrancher de ses premiers vers ; son message devait s’alTranchir des règles étroites de la métric[ue, couler sans obstacle, être émancipé comme le poète et comme le grand pays, le peuple et le système démocratique de vie et de pensée qu’il voulait célébrer. Telle fut à peu près la genèse des fameuses Leaves of Grass, douze poèmes issus naturellement de l’expérience de leur auteur comme autant de brins d’herbe surgis de la terre nourricière. Wlîitman, bien entendu, collabora à la composition matérielle du livre, qui parut à Brooklyn, en 1855.

Un tel évangile n’était pas attendu avec impatience par le public qui avait connu la Presidentiad de Pierce. On attend rarement les évangiles et autres innovations, surtout en littérature. Plusieurs passages, aujourd’hui célèbres, traitaient de sujets délicats avec une liberté caractéristique. Le ton recherché de l’ouvrage, les énumérations de catalogue, la nouveauté des rythmes sulfisaient déjà à étonner et à scandaliser à peu près tous les rares lecteurs. Son optimisme poussé à l’extrême et son ultra-catholicisme auraient suffi à exaspérer déjà le public à cette époque de ténèbres et de désaccord. Cependant, — quoique, ne s’étant pas vendu, il n’ait eu par suite aucun effet réel sur l’époque, — ce fut un bien que Lea^’es of Grass ait été écrit à ce moment. Cette œuvre représentait, crûment si l’on veut, la vitalité et