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252 LA PÉRIODE LOCALE (1830-1865)

savoir quel bénéfice ils pourront tirer de sa lecture ; ils se contentent d’en éprouver du plaisir ou de l’émotion. Poe, avec la troublante mélodie de son vers, avec ses récits étranges, éthérés et terrifiants, sut h la fois les charmer et les émouvoir. En un mot, la civilisation vieillie de l’Europe a accueilli avec joie un génie littéraire original et neuf. A mesure que le pays natal de Poe marchera vers la complication et la recherche littéraire, son génie et sa puissance y seront de mieux en mieux appréciés.

L’œuvre de Poe a donc résisté mieux que celle de tout autre écrivain américain à l’épreuve de l’approbation universelle. Poe eut aussi, de son vivant, de fervents admirateurs, et sa renommée s’est élevée si rapidement en Amérique, qu’il ne serait pas impossible pour les critiques de prétendre que la supériorité de Hawthorne n’est plus un point suffisamment établi.

jNIais quelle fut le fondement de l’intérêt que lui portèrent ses admirateurs, compatriotes et étrangers ? On ne peut mieux répondre h cette question qu’en répartissant ses œuvres en trois catégories : poésie, contes en prose et critique, et en essayant de définir de quelle façon il réussit dans chacun de ces genres Si l’on peut montrer qu’il a réussi excellemment dans les deux premiers, il s’ensuivra qu’il a plus de chances de survivre dans la postérité, car la belle poésie est ce qui a le plus de durée. D’autre part, ses romans et ses nouvelles lui donneront l’avantage sur des écrivains comme Emerson et Lowell, qui pourraient lui disputer le prix de la poésie, mais qui ne sont guère capables, par leurs ouvrages d’éthique et de critique, d’exercer dans le monde littéraire une inlluence bien durable.

Le faible volume de la production poétique de Poe