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238 LA PÉRIODE LOCALE (1830-1865)

tâche qui pourrait passer pour téméraire et peu opportune. Après tout il n’y a guère lieu de s’écarter de l’avis des plus élogieux de ses critiques, sauf sur un point peut-être. Aucun pays ne peut offrir à l’admiration une plus belle figure morale que celle d’Hawthorne, une personnalité plus séduisante en elle-même, un génie plus authentique et plus unique. On peut se demander, cependant, si les admirateurs de l’homme et de l’œuvre — c’est dire presque tous ceux qui les connaissent — n’ont pas exafj-éré la force intellectuelle de l’homme et la portée philosophique de ses créations artistiques. Les lettres et les notes d’Hawthorne révèlent un noble caractère et une imagination subtile, mais peut-on y voir le penseur, le prophète que bien des gens y ont découvert ? Ses contes, ses esquisses, ses romans dénotent une science étonnante du cœur humain, soit torturé par le remords, soit aux prises avec l’amour de soi-même ou d’autrui, ou bien avec des désirs inconnus, soit encore subissant l’influence heureuse d’une douce et naturelle affection ; mais avec toute leur imagination analytique, ces ouvrages suffisent-ils à nous convaincre que l’auteur « a vu la vie d’un œil calme et l’a vue tout entière », que sa vision fut aussi étendue qu’elle fut profonde, que, comme créateur de caractères, comme peintre et interprète de la vie, sa place est parmi les grands esprits de la littérature ? Probablement beaucoup répondront qu’ils n’ont jamais songé à pareille revendication à propos d’Hawthorne ; la meilleure critique h faire de ces partisans enthousiastes, c’est de dire qu’en parlant de lui ils ont trop souvent usé de termes qui ne s’appliquent qu’aux dramaturges et aux romanciers les plus grands.

Mieux que tous les auteurs américains, Hawthorne possède le charme de faire revivre le passé et de parler