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16 LA PERIODE COLONIALE (1007-1764)

tifs alors à la mode, des compositions qui, selon ses propres paroles, avaient « fait tant d’impression sur son cerveau aride ». Mais la poétesse rougit de ces compositions quand elle les vit imprimées, et elle écrivit une sorte d’envoi où elle parlait de son livre comme d’un « enfant égaré ». Elle avait perdu pied dans ce flot de bizarre afFectation qui, parti d’Espagne et d’Italie, avait balayé la France et l’Angleterre avec les eflets les plus désastreux. Le « profond savoir », la « sévère théologie » qu’elle rencontra dans Tencyclopédique Création de Du Bartas, l’avaient éblouie, ainsi qu’elle le confesse dans le poème qu’elle écrivit en l’honneur du poète français ; et cela d’autant plus, comme l’ont justement fait observer ses commentateurs, que ce Français était un disciple de Calvin,

Fidèle à ses concepts puritains sur la valeur didactique de la poésie, et à l’exemple de ses maîtres anglais, Mrs. Bradstreet s’attacha surtout à décrire « les quatre éléments, les constitutions, les âges de l’homme, les saisons de l’année ». A ce vaste plan elle joignit « un épitome exact des quatre monarchies, savoir : les Assyriens, les Perses, les Grecs, les Romains ». Elle offrit encore aux lecteurs « un dialogue entre la Vieille et la Nouvelle-Angleterre à propos des troubles récents » et divers autres poèmes plaisants ou sérieux. Cette poésie peu délectable, si bien adaptée cependant aux goûts de l’époque, n’a plus à présent aucune valeur sinon pour l’historien littéraire.

Bien que Mrs. Bradstreet ait été le meilleur poète de l’Amérique du xvii^ siècle, ce n’est pas elle pourtant qui écrivit le meilleur poème. Si Nathaniel Bacon, le hardi rebelle de la Virginie, était descendu dans son obscur tombeau sans VEpilaph uiade bij his Man, la poésie coloniale américaine eût été privée de son plus beau,