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204 LA PERIODE LOCALE (1830-1865)

impraticable qu’ait été l’expérience, elle fut entreprise par des Américains qui n’avaient pas perdu tout sens commun ni toute capacité pour les affaires. Chaque porteur de parts devait recevoir un modeste intérêt, et sa responsabilité était strictement limitée. Si l’acquisition d’une ferme médiocre à West Roxbury, à neuf milles de Boston, et l’intention d’en tirer profit peuvent être invoquées pour diagnostiquer la folie des promoteurs de l’entreprise, on peut aussi arguer qu’une telle folie caractérise encore des milliers d’Américains, qui font preuve d’assez de bon sens à bien d’autres égards.

L’établissement simultané d’une école n’était pas si mal conçu, comme plusieurs institutions l’ont démontré dans la suite ; et de ce côté l’entreprise réussit. Le succès fut également atteint pour lo principal objet que se proposèrent les fondateurs, h savoir : la simplification rationnelle et heureuse de l’existence. L’adoption des principes de Fourier (1844), loin d’amoindrir les difficultés, ne fit que les accroître, et les bénéfices résultant de l’oroanisation d’un organe littéraire, The Harbin^er, ne suffirent naturellement pas à payer la réédification du phalanstère, non achevé d’ailleurs, et dont les bâtiments n’étaient pas assurés quand il brûla le 3 mars 1846. Les Ripley eux-mêmes et le fidèle John S. Dwight furent forcés de reconnaître que la réorganisation de leur société dépassait de beaucoup ce qu’ils avaient rêvé.

Les « Brook Farmers », déchus du primitif état d’innocence et de sincérité qui leur avait attiré des élèves comme George William Curtis et son frère, suivirent chacun leur voie. Ripley, peu de temps après, trouva un débouché à sou inlassable activité dans des articles de critique érudite qui remplirent les colonnes de la Tribune de New York, dont l’excentrique direc-