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toire d’après le chaos. Il régala ses lecteurs, tantôt d’un plat rapport sur des opérations en mer ou sur terre, tantôt de la description d’un bal, tantôt de celle du fameux incendie du théâtre de Richmond ; mais ils se régalèrent aussi de tentatives de séduction, d’enlèvements et d’apparitions intermittentes d’ « un chef mystérieux » qui finit par n’être autre chose qu’une allégorie de l’esprit de Washington. En d’autres termes, Woodworth, en recherchant l’originalité, mêla dans ses romans désordonnés le fantastique et la froide réalité. Après The Spij, de telles monstruosités littéraires eurent moins de chances de voir le jour.

L’œuvre d’Irving et de Cooper vint pourtant trop tard pour être utile à un homme très doué, de quelques années plus jeune qu’eux, John Neal (1793-1876). Originaire du Maine, Neal, qui ne dut qu’à ses propres efforts l’instruction qu’il acquit, fut tour à tour instituteur, marchand d’étoffes, étudiant en droit, et se découvrit soudain la vocation d’un poète et d’un romancier. En 1824, il alla en Angleterre, dans le but de répondre à la question qu’avait formulée Sydney Smith trois ans auparavant : « Qui lit un livre américain ? » Neal réussit a faire paraître dans le Blackwood’s plusieurs de ses articles sur la littérature et la politique américaines ; ces articles attirèrent l’attention de Bentham, qui fit de l’auteur l’un de ses secrétaires. En 1827, il retourna en Amérique, encouragea les efforts de Poë, se fit journaliste et réformateur social, et prodigua son énergie d’une façon quasi titanique, au point qu’il se vantait d’avoir écrit en douze ans de quoi remplir cinquante-cinq volumes.

De ce fatras, on peut extraire Logan (1822), le modèle de son genre de fiction. Le mystérieux et implacable chef indien, le funeste Harold, l’inexplicable Elvire, agissent