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PIERRE QUI ROULE

jourd’hui, a tenu le haut du pavé dans le comté de Richelieu pendant les dix années qui ont précédé la Confédération. M. Guévremont a été élu et réélu en qualité d’habitant jusqu’à sa nomination au Sénat. Lorsqu’on disait à ses partisans qu’il n’était pas suffisamment au courant des affaires politiques, on provoquait une réponse dans le genre de celle-ci :

« Ah ! monsieur, il est poli ; bien plus poli que vos messieurs du Fort. Il nous ôte son chapeau chaque fois qu’il nous rencontre. »

Le bonhomme Jacquot (le vrai) à qui l’on demandait son opinion, avait répondu :

— « Tu veux le saouère, eh ! ben, saké tà yâbe, chu pou Ledémont. »

Un orateur qui protestait de son dévouement à la classe agricole s’était attiré cette foudroyante répartie : — « On a pas besoin d’vot’ sapré bricole : on l’attellera au joug. »

La Gazette de Sorel sans y attacher le moindre sens péjoratif, ayant parlé des mains calleuses des cultivateurs, un partisan de M. Sincennes avait été violemment interrompu à la porte de l’église de Sainte-Victoire, et n’avait pas réussi à convaincre les gens que le rédacteur, M. Barthe, n’avait jamais écrit « mains galeuses ».

Il y avait eu contestation de l’élection de M. Sincennes, mais le protêt n’avait pu être signifié qu’après une bataille en règle. La demeure du nouveau député avait été assiégée par les partisans de M. Guévremont, et certains habitants de Sainte-Victoire, qui étaient allés au marché ce jour-, n’avaient pas vendu leurs charges de bois, ayant transformé leurs bûches en projectiles qu’ils avaient lancés à la figure des défenseurs de la maison Sincennes.

Le récit de cette bagarre, où il y avait eu de nombreux blessés, dont quelques-uns assez grièvement,