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PIERRE QUI ROULE

Le rôle de force inerte, servant à entraver la marche du progrès, ne me sourit pas du tout. Aux ratés qui me crient aux oreilles le proverbe « Pierre qui roule n’amasse point de mousse ». Je réponds : « Le parasite me fait horreur, qu’il soit à l’état de plante ou d’animal, et vous pouvez garder pour vous toutes les moisissures, tous les insectes et toutes les alluvions que vous rapporte votre immobilité professionnelle. »

Quéquienne avait acheté une maison à Worcester après avoir vendu sa terre de Stoke. Au salaire assez raisonnable que lui payait le journal s’ajoutaient les recettes provenant des conférences qu’il faisait sur demande dans divers centres franco-canadiens de la Nouvelle-Angleterre.

Son fils aîné, revenu de Paris où il était allé étudier la musique, avait fait sa première année d’études médicales à l’Université de Baltimore. Ses deux autres fils commençaient à s’initier aux mystères du journalisme. Tout allait pour le mieux lorsque, sa digne épouse fut atteinte d’une cruelle maladie qui l’emporta au bout de six mois de souffrances indicibles. Après vingt-huit ans d’une union parfaite dont les vicissitudes de l’existence n’avaient fait que resserrer les doux liens, le malheureux survivant se demandait s’il n’était pas le jouet d’un rêve affreux. Jusqu’au dernier moment, il avait espéré qu’un miracle lui conserverait la vaillante compagne qui l’avait soutenu et encouragé dans toutes ses tribulations. Il la fit inhumer à Woonsocket, avec les parents qui l’avaient précédé dans la tombe.

Quelques mois après il revenait à Ottawa. Il fut d’abord employé à la Bibliothèque du Parlement, puis nommé traducteur à la Chambre des Communes.

Au cours de l’été de 1897, profitant du congé annuel accordé aux employés publics, il retourna aux États-Unis pour s’occuper de la vente d’un troisième volu-