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PIERRE QUI ROULE

« Il me semble que je vois mieux, maintenant, à travers le masque des politiciens de l’époque : d’abord, parce que des études subséquentes m’ont fourni l’occasion d’avoir une meilleure vue de l’ensemble et ensuite parce qu’alors, j’étais dans le mouvement, ce qui m’empêchait d’examiner les rouages de la machine. Aujourd’hui il y a des voies ferrées tant et plus. Les chemins à lisses de bois ont dû être abandonnés tour à tour. Les grandes compagnies ont absorbé les petites. Les dettes fédérales, provinciales et municipales se sont accumulées.

« On a accompli de grandes choses : on a plus de chemins de fer qu’on en peut alimenter ; mais, au lieu d’enrichir les populations rurales, ces voies ferrées, construites à leurs frais, leur ont facilité les moyens d’émigrer. Il y avait alors bisbille entre John Henry Pope de Cookshire, qui n’était pas encore ministre, mais qui était député fédéral de Compton, et J. G. Robertson, député de Sherbrooke à la Législature locale, devenu plus tard trésorier de la province.

« M. Pope prenait parti pour M. Sawyer et M. Robertson, pour M. Ross. La grande question en litige était l’établissement de la ligne du chemin de fer, devenue plus tard l’International et vendu par M. Pope, simple particulier, à M. Pope, ministre de l’Agriculture, pour le compte de M. Pope, capitaliste, et pour le service de la compagnie du chemin de fer Pacifique Canadien subventionnée par le gouvernement dont M. Pope faisait partie.

« M. Ross et M. Robertson voulaient tirer la ligne du côté nord. MM. Pope et Sawyer voulaient la tirer du côté sud. La lutte fut chaude. M. Ross était un orateur assez populaire. M. Sawyer avait pour lui la popularité de M. Pope qui était alors dans ses meilleurs jours. M. Sawyer fut élu. Ce fut la première élection à laquelle je pris une part active. À la de-