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PIERRE QUI ROULE

offrit même de le mettre à la place de l’Union Jack, ce à quoi les zouaves ne voulurent pas consentir. Le capitaine avait été un tant soit peu malmené et cette histoire, exagérée à dessein par les journaux protestants, leur fournit pendant longtemps un sujet de discussion.

« Le 15 juin, l’église catholique d’Oka avait été brûlée par une bande de sauvages protestants. Une enquête avait été ouverte à ce sujet et tous les journaux de la clique, tous les révérends ministres évangéliques du pays prenaient fait et cause pour les coupables. On organisait de saints pique-niques à Oka ; on prononçait de saints discours, exhortant tous les Protestants à courir sus aux Catholiques, coupables d’avoir vu en plein jour, leur église brûlée par une bande armée.

« On avait fait au malheureux Hackett des funérailles imposantes. Autant de matière à articles virulents contre les Catholiques qui, naturellement, répondaient sur le même ton.

« On sait que les évangélisateurs protestants avaient réussi à faire croire aux Indiens, endoctrinés par eux, que ceux-ci avaient le droit de construire un temple protestant sur une propriété appartenant aux Sulpiciens. L’église des apostats avait été construite malgré les protestations des Sulpiciens, puis démolie par autorité de justice après les sommations de rigueur.

« Des ministres protestants conseillaient ouvertement la révolte, du haut de la chaire, dans des assemblées publiques et dans les journaux. Leurs menées séditieuses, beaucoup plus coupables que l’agitation qui, en 1837-38 avait été étouffée dans le sang des Canadiens, beaucoup plus inexcusables que les deux insurrections du Nord-Ouest, ne provoquèrent aucune mesure de répression de la part des autorités.

« Et lorsque leurs discours incendiaires eurent produit leur effet, bien loin de songer à mettre cinq mille hommes sur pied pour s’emparer des agitateurs et leur