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PIERRE QUI ROULE

« J’eus l’occasion de les combattre, d’abord dans les Laurentides, puis dans la Gazette de Joliette, et plusieurs de mes articles eurent les honneurs de la reproduction dans les grands journaux de Montréal et de Québec.

« Le tracé du chemin de fer de la Rive Nord, aujourd’hui embranchement du Pacifique Canadien, était alors le sujet d’une vive discussion. Chacun prêchait pour son saint. Je prêchai pour le mien, qui s’appelait Lin de son petit nom. Je prêche encore pour les industries textiles. J’ai débuté à Saint-Lin et me voilà rendu dans une ville où l’on ne peut pas dire qu’on file un mauvais coton, puisque nous avons ici la quantité et surtout la qualité en ce qui concerne ce produit.

« Saint-Lin et Fall River m’apparaissent comme les deux points terminaux de ma carrière journalistique. La sainteté de Lin et la qualité des produits textiles de l’autre ont dû exercer une certaine influence sur ma destinée. Il faudra examiner cela plus tard, quand nous en aurons le temps.

« J’étais à peine entré à la Gazette de Joliette que survenait à Montréal le meurtre de l’orangiste Hackett. À force de soulever les préjugés protestants, à force de dire du mal des Catholiques en général et des Canadiens-français en particulier, on avait ameuté toute la clique orangiste. Les journaux de Toronto ne songeaient qu’à représenter les nôtres comme des assassins altérés du sang des Protestants, mais trop lâches pour leur résister dès qu’ils étaient en nombre. Il fallait, disaient-ils, donner une leçon aux papistes. Dans ce noble but, les orangistes de toute la Confédération devaient aller dans la ville catholique de Montréal provoquer la population irlandaise et parader dans les rues en chantant les couplets les plus bêtes et les plus insultants de leur stupide répertoire.