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PIERRE QUI ROULE

ringouins, mais le froid était piquant. Les randonnées de ce genre n’offrent rien de particulièrement sybaritique. Pourtant, Quéquienne semble y avoir pris goût, puisqu’au commencement de janvier 1873, il passa deux jours et deux nuits en forêt à courir le chevreuil.

La chasse de ce gibier était alors permise entre les mois d’octobre et de mars, vu que pendant cette période il était plus difficile de le poursuivre en raquettes. Lorsque la neige s’amollit et que les gelées forment une croûte à la surface, le raquetteur a plus de chances de fatiguer le gibier qui s’enfonce dans la neige parce que les ongles fourchus de ses sabots traversent la croûte en question. Cette année-là il y avait eu un dégel prématuré suivi d’une recrudescence de froid et les chasseurs de Stoke avaient pu, sans enfreindre la loi, se livrer à leur sport favori. Quéquienne était parti avec deux chasseurs expérimentés.

Vers dix heures, les chiens levèrent le gibier et la course commença. Quéquienne n’était pas, comme ses compagnons, accoutumé à la course en raquettes sous bois, sur un sinueux parcours tracé par une bête affolée. Il s’était embarrassé d’une lourde carabine Enfield, arme absolument inutile pour une chasse de ce genre. Au bout d’un quart d’heure, les deux autres l’avaient distancé au point qu’il ne les rejoignit que lorsqu’ils eurent fait leur première capture.

C’était une belle chevrette que l’un des chasseurs, Jim Guillemette, avait enfourchée. Il maintenait sous son poids la pauvre bête enfoncée dans la neige et complètement épuisée. Il manifestait l’intention de la prendre vivante et les deux autres y consentirent. Comme on n’avait pas de traîne sauvage, on fit à la chevrette un lit de branches de sapin sur lequel on la lia et l’on entreprit de la sortir du bois. Il était alors environ quatre heures de l’après-midi. Vers minuit