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PIERRE QUI ROULE

tement ; mais cela donne peut-être un certain degré d’originalité à ma manière d’envisager les choses.

« Pendant mes trois années de séjour à Stoke, j’ai pris part à trois élections. D’abord, celle de M. Webb, député fédéral de Richmond et Wolfe, réélu en 1872 contre M. Graham. Tous deux étaient conservateurs, mais M. Webb était le candidat ministériel et il fut élu après une lutte sérieuse. Tous deux étaient francs-maçons, et M. Webb n’en avait jamais fait mystère. Cependant, je me rappelle que, dans certaine paroisse du comté de Wolfe, M. Graham fut dénoncé du haut de la chaire comme franc-maçon et, à ce titre, indigne de recevoir les suffrages des catholiques, tandis que son adversaire, tout aussi franc-maçon, mais beaucoup plus ministériel que lui, recueillait le fruit de ce zèle antimaçonnique.

« Je représentai M. Webb au poll de Stoke Centre. On votait alors ouvertement et je fus témoin de plusieurs scènes beaucoup plus curieuses qu’édifiantes, qui n’eurent pas précisément pour effet d’augmenter mon admiration envers les chefs de parti et les moyens qu’ils prenaient pour assurer leur succès dans les élections. Je pris aussi part à l’élection de M. Picard qui fut réélu contre M. Jones du Guardian de Richmond.

« À la suite du scandale du Pacifique, l’honorable Henry Aylmer s’était présenté comme libéral dans Richmond et Wolfe. Son père, Lord Aylmer, de Melbourne, était venu à Stoke pour parler en sa faveur. Aucun étranger n’était là pour lui répondre et je fis la discussion contre lui. Stoke donna la majorité à M. Webb, mais M. Aylmer fut élu.

« En quittant les États-Unis pour retourner au Canada, je m’étais figuré que j’abandonnais une terre anglo-saxonne pour aller me fixer sur un sol resté bien français, asile d’une nationalité franco-canadienne exerçant librement une souveraineté incontestable, du