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Depuis deux cent cinquante ans l’âme canadienne a eu ses orateurs, ses écrivains, ses poètes, ses dramaturges. A-t-elle été dignement interprétée ? Nous abordons résolument l’affirmative.

Lorsque le mouvement littéraire commence, la foule ne sait pas encore ce que la politique internationale prépare au sol canadien. Dès 1650 on versifie, on rime, on fait de la satire qui se communique de main à main. Les épigrammes courent sous le manteau. On entend, près des vastes cheminées, lecture des essais poétiques. Le théâtre, embryonnaire, fait résonner les premiers vers qu’on ait écrits pour la scène depuis le départ de Marc Lescarbot. La nation n’existe pas, c’est vrai, ou du moins rien ne la fait vibrer dans le petit groupe lettré qui s’amuse à narguer la Métropole. La guerre de Sept ans inspirera des strophes en l’honneur de Carillon, mais nos guérets n’auront aucune part dans ce pas d’armes triomphal. Il faut attendre la Cession pour voir sortir de terre le rêve de Champlain. C’est alors que le peuple se concerte. C’est alors que son cœur se met à battre, et sa pulsation se répercute dans chaque individu. Du haut de la tribune et du haut de la chaire, l’éloquence patriote dit publiquement ce que chacun sent dans le secret de sa pensée. De Rocheblave, Papineau, Lafontaine et Morin sont de beaux noms à