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de la moitié de la nuit à faire manger leurs chevaux, à les pancer, et à les charger.

On trouve à achetter à la porte de ces Hôtelleries, du pain, des poules, des œufs, des fruits, quelquefois du vin ; on va se pourvoir au village prochain si l’on manque de quelque chose. S’il y a des Chrétiens, l’on y trouve du vin, sinon il faut s’en passer. On ne paye rien pour le gîte. Ces retraites publiques ont conservé en quelque maniére le droit d’hospitalité, si recommandable chez les anciens.

Les Hôtelleries des villes sont plus propres et mieux bâties ; elles ressemblent à des monastéres, car il y en a beaucoup où l’on a bâti une petite Mosquée ; la fontaine est ordinairement au milieu de la cour ; les cabinets pour les nécessitez sont autour ; les chambres sont rangées le long d’une grande galerie, ou dans des dortoirs bien éclairez. Dans les Hôtelleries de fondation on ne donne pour tout payement qu’une estrene au concierge, et l’on est à bon marché dans les autres ; pour y être à son aise, il faut avoir une chambre pour la cuisine. Le marché n’est pas loin, car l’on achette à la porte de la maison, viande, poisson, pain, fruits, huile, beurre, pipes, tabac, caffé, chandelles, et jusques à du bois. Il faut s’adresser à des Juifs ou à des Chrétiens pour avoir du vin, et pour peu de chose ils l’apportent en cachette ; le meilleur est chez les Juifs, et le moindre chez les Grecs : nous en avions ordinairement d’excellent, parce que nos gens qui s’y trouvoient interessez ne manquoient pas de publier dans le quartier que nous étions Medecins. On venoit nous demander des remedes, ou nous prier de voir des malades, et l’honoraire se réduisoit ordinairement à quelques bouteilles de bon vin. Il y a de ces Hôtelleries où l’on fournit aux dépens du Fondateur, la paille, l’orge, le pain, et le ris.