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pagné des Intendans de Justice, des grands Cadis, des plus fameux Prédicateurs, en un mot de tous ceux qu’on appelle principaux Officiers de la Foy, et de celui même qui se dit le Chef de la race de Mahomet : Le Moufti, dis-je, la tête baissée jusques à terre et les mains dans sa ceinture, vient baiser l’épaule du Sultan ; on dit que ce Prince avance un pas pour le recevoir. Le Janissaire Aga fait son compliment le dernier de tous, aprés que les Officiers qui ont accompagné le Moufti ont fait leur reverence. Quand le repas est fait on distribuë de la part du Grand Seigneur des vestes de Marte Zibeline aux premeirs Officiers de la Porte. Voilà ce qui se passe à l’entrée du Serrail. Dans l’interieur de ce Palais, le Sultan reçoit des complimens des Chefs des Eunuques et de ses premiers Gentilhommes. Les Sultanes même sortent de leurs appartemens et passent en carrosse chez le Grand Seigneur ; mais ces carrosses sont fermez avec le même soin que si l’on conduisoit des prisonniers. On asseure que pendant les trois jours, qu’il est permis à ces Dames de venir chez le Sultan, ce Prince n’est servi que par des Eunuques noirs ; les Pages, les Eunuques blancs, les Gentilhommes, enfin tous ceux qui n’ont pas le visage noir en sont exclus pour tout ce temps-là. Les Dames se visitent aussi entre elles aprés avoir offert leurs vœux à l’Empereur.

Les Mahometans célebrent encore quelques autres festes pendant le reste de l’année. J’ay eû l’honneur, Mgr. de vous parler du petit Bairam dans ma troisiéme Lettre : cette feste se solemnise le 70e jour aprés le grand, c’est à dire le 10e. jour de la Lune de Zoulhigé, et les pelerins qui vont à la Méque prennent si bien leurs mesures, qu’ils y arrivent la veille de ce même jour. Les Turcs célebrent aussi avec réjoüissance la nuit de la naissance de Mahomet, qui est la nuit du 11 au 12 du 3e mois. On fait les