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Il faut que ce soit le Lac de Selinusia de Strabon. En allant au Port, on voit sur le bord de la riviere beaucoup d’anciennes ruines et de vieux marbres. C’étoit là proprement le quartier d’Ephese que Lysimachus avoit fait bâtir, et où se trouvoient les Arsenaux dont parle Strabon. On passe le Caystre à quelques pas de là dans un Bac à corde, pour aller de Scalanova à Smyrne, sans venir passer sur le Pont. C’est encore l’ancien chemin d’Ephese à Smyrne, car c’est le plus court, et Strabon assûre qu’il alloit en droiture d’une de ces villes à l’autre ; c’est aujourd’hui le chemin le plus dangereux.

Quoique la plaine d’Ephese soit belle, néanmoins la situation de Smyrne a quelque chose de plus grand ; et la colline qui en termine le golphe, est comme un theatre destiné pour representer une belle ville ; au lieu qu’Ephese est dans un bassin. D’ailleurs quoique cette ville ait eté le siége du Proconsul Romain, et le rendévous des étrangers qui alloient en Asie, son Port n’a jamais eté comparable à celui de Smyrne. Celui d’Ephese, à l’occasion duquel on a frappé tant de Médailles, n’est qu’une rade découverte et exposée ; il n’est plus frequenté à présent. Autrefois les bâtimens entroient dans la riviere, mais la barre a été depuis comblée de sable.

Rien n’est si ennuyeux que de chercher les fondateurs d’Ephese dans les anciens livres. Que nous importe de sçavoir comment elle s’appelloit du temps de la guerre de Troye ? ou si elle a pris son nom d’Ephesus fils de Caystre et de l’Amazone Ephese ? Il n’est guere plus important de sçavoir si c’est l’ouvrage des Amazones, ou d’Androclus, un des fils de Codrus Roy d’Athenes ; cela ne peut servir qu’à éclaircir un endroit de Syncelle, où il est dit que ce fut Andronic, au lieu d’Androclus, qui fit bâtir Ephese. Qui est-ce qui s’embarasse de sçavoir s’il y