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venerable vieillard de 118 ans, qui se vantoit d’être dans le troisiéme siécle de sa vie, puisqu’il étoit né sur la fin de 1500, et nous le regardions comme le Doyen du genre humain. Il étoit d’une taille moyenne et quarrée ; il mourut quelque temps aprés. On asseûroit qu’il avoit eû prés de 60 enfans de cinq femmes qu’il avoit épousées, sans compter ses maîtresses et ses esclaves, car le bon homme étoit de complexion amoureuse. Ce qu’il y a de plus certain, c’est que le plus vieux de ses garçons est mort avant lui, âgé de 85 ans, et la plus jeune de ses filles n’en avoit que seize pour lors.

Les Caravanes de Perse ne cessent d’arriver à Smyrne, depuis la Toussains jusques en May et Juin. On y porte quelquefois jusques à deux mille balles de soye par an, sans compter les drogues et les toiles. Nos François y portent de la Cochenille, de l’Indigo, de la Salsepareille, au bois de Bresil et de Campech, du Verd de Gris, des Amandes, du Tartre, du Poivre, de la Canelle, du Girofle, du Gingembre, de la Muscade. Les Draps de Languedoc, les Serges de Beauvais, les Cadis de Nismes, les Pinchinats, les Satins de Florence, le Papier, l’Etain fin, le bon Acier et les Emaux de Nevers y sont de bonne débite. Avant que nôtre commerce y fût bien établi, les marchands des autres nations nous appelloient Mercanti di Barretti, parce que nous fournissions, de même qu’aujourd’hui, presque tous les bonnets et les calotes de laines. Nous y portions aussi de la Fayance ; mais la plus grande quantité est envoyé d’Ancone. On estime à Smyrne les Foüines de France, et sur tout celles du Dauphiné, dont on se sert pour les fourrures. Une fourrure de veste s’y vend depuis 50 jusques à 80 écus ; on mêle les plus foncées en couleur, avec le Samour qui est la Marte Zibeline ou la Foüine de Moscovie. On employe