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drid. Les Juifs à qui je m’adressai, m’asseûrerent qu’ils avoient toujours conservé leur langue naturelle, depuis que leurs peres s’étoient retirez de Grenade en Asie. Il est vrai qu’ils choisirent la ville du monde qui, par sa situationet par ses fontaines, ressemble le plus à Grenade, comme je l’ay dit ci-devant.

Le 21 Novembre nous partîmes à sept heures du matin pour aller voir le mont Olympe, dont la montée est assez douce ; mais aprés trois heures de marche à cheval, nous ne trouvâmes que des Sapins et de la neige ; de sorte que, sur les onze heures, nous fûmes obligez de nous arrêter prés d’un petit lac dans un lieu fort elevé. Pour aller de là au sommet de la montagne, qui est une des plus grandes d’Asie, et semblable aux Alpes et aux Pyrenées, il faudroit que les neiges fussent fondües, et marcher encore pendant toute une journée. La saison ne nous permit pas d’y voir les Plantes les plus curieuses. Les Hestres, les Charmes, les Trembles, les Noisetiers n’y sont pas rares. Les Sapins ne different point des nôtres, car nous en examinâmes les feüilles et les fruits avec exactitude. Aprés tout nous ne fûmes pas trop contens de nôtre herborisation, quoique nous y eussions remarqué quelques Plantes singulieres, parmi beaucoup d’autres qui sont communes sur les montagnes d’Europe. C’est prés de ce mont Olympe, que nos pauvres Gaulois furent deffaits par Manlius qui, sous pretexte qu’ils avoient suivi le parti d’Antiochus, voulut se vanger sur eux des maux que leurs peres avoient faits en Italie.

Le 23 Novembre nous allâmes voir les nouveaux Bains de Capliza, au Nord-Nord-Oüest à un mille de la ville et à main droite du chemin de Montania. Les Turcs les appellent Iani-Capliza, c’est à dire Nouveaux Bains. Ce sont deux batimens tout prés l’un de l’autre, dont le plus