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qu’une nature en Jesus-Christ, ou pour mieux dire deux natures si bien confonduës, que quoiqu’ils admettent les proprietez de chacune en particulier, ils ne veulent pourtant entendre parler que d’une seule nature. Leurs plus habiles Evêques prétendent se laver de cette heresie, et soutiennent que toute l’erreur vient de la disette de leur langue, laquelle manquant de termes propres, fait qu’ils confondent souvent le mot de nature, avec celui de personne. Lorsqu’ils parlent de l’Union hypostatique, ils croyent la prouver assez en confessant que Jesus-Christ dans l’Incarnation est Dieu parfait et homme parfait, sans mêlange, sans changement, et sans confusion. La verité est qu’ils ne s’expliquent pas tous également, et que la pluspart ont grande vénération pour deux fameux Eutychiens Dioscore et Barsuma. Quand on leur reproche qu’ils excommuniérent les Peres du Concile de Calcédoine pour avoir condamné les premiers de ces heretiques ; ils avoüent que quoiqu’il paroisse ridicule d’excommunier les morts, la coûtume s’en étoit introduite parmi eux pour se vanger des Grecs, qui dans toutes leurs fêtes excommunient l’Eglise Armenienne ; que pour eux ils n’avoient pas dessein d’excommunier précisément les Peres du Concile de Calcedoine qui avoient condamnée Dioscore Patriarche d’Alexandrie sans trop examiner ses raisons ; mais que leur intention étoit d’excommunier les Evêques Grecs d’aujourd’hui, comme successeurs des Prelats de la plus fameuse assemblée qui se soit jamais tenüe en Grece ; que les Peres Grecs avoient fait une grande injustice à Dioscore de confondre ses sentimens avec ceux d’Eutyches, puisque Dioscore avoit toujours soutenu que le Verbe Incarné étoit Dieu parfait et homme parfait. La source de l’inimitié irréconciliable des Armeniens et des Grecs vient depuis ce Concile ; et cette ini-