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fit mille questions sur ce que nous avions veû dans nôtre route, et sur tout touchant la difference que nous trouvions entre la Turquie et la Perse. Aprés l’avoir remercié de sa recommendation pour le Pacha de Cars, nous lui contâmes une partie de nos avantures ; nous nous loüames fort du bon naturel des Persans, et du bon accueil qu’ils faisoient aux Francs. Il nous dit entre autres choses, que le Patriarche des Trois Eglises étoit un bon marchand d’Huile, faisant allusion au procez qu’il a avec le Patriarche Armenien de Jerusalem, pour le débit de l’Huile sacrée que l’on employe dans l’administration des sacremens parmi les Armeniens.

Nous allâmes visiter la campagne aprés nous être délassez dans la ville, et ne manquâmes pas de parcourir la belle vallé des 40 Moulins où nous avions laissé trop de Plantes rares en fleur, pour oublier d’en aller amasser les graines. Nous passâmes dans le même dessein le premier Septembre au Monastere Rouge des Armeniens, d’où nous montâmes encore vers les sources de l’Euphrate pour continuer nôtre moisson. Les Curdes, graces à Dieu, avoient evacué ces Montagnes, ainsi nôtre seconde récolte fut faite avec plus de tranquillité que la premiere. Cette récolte consistoit plus en graines de plantes que nous avions déja veües, qu’en nouvelles découvertes ; mais ces graines n’étoient pas le moindre fruit de nôtre voyage. C’est par leur moyen que les Plantes d’Armenie se sont répanduës dans le Jardin du Roy, et dans les plus celebres Jardins de l’Europe, aux Intendans desquels nous en avons communiqué une bonne partie. Nous nous amusions de cette maniére autour d’Erzeron, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, et nous ne laissions pas de glaner utilement. Voici la description d’une tres belle espece d’Armoise, dont personne, je crois, n’a fait encore aucune