Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/427

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chaque fleur est soutenuë par un pedicule tres-délié et fort court. Le pistile devient un fruit long d’environ demi pouce, épais de quatre lignes, de figure conique, canelé profondément dans sa longueur. Les caneleûres sont quelquefois droites, quelquefois spirales. Leurs arrêtes sont terminées par des aîles découpées en franges, tres-menuës. Quand on coupe le fruit en travers on en découvre la partie moelleuse, laquelle est blanche et angulaire. Les fleurs ont l’odeur de celles du Tilleul, ne se flétrissent que tard, et restent à la base du fruit comme une espece de rosette. Les feüilles ont un goût d’herbe, mais stiptique.

Nous commençâmes à monter ce jour-là le Mont Ararat sur les deux heures aprés midi ; mais ce ne fut pas sans peine. Il faut grimper dans des sables mouvans où l’on ne voit que quelques pieds de Geniévre et d’Epine de bouc. Cette Montagne qui reste entre le Sud et le Sud-Sud-Est des Trois Eglises, est un des plus tristes et des plus desagreables aspects qu’il y ait sur la terre. On n’y trouve ni arbres ni arbrisseaux, encore moins de Couvents de Religieux Armeniens ou Francs. Mr Struys nous auroit fait plaisir de nous apprendre où logent les Anachorettes dont il parle, car les gens du pays ne se souviennent pas d’avoir oüi dire qu’il y ait jamais eû dans cette Montagne, ni Moines Armeniens, ni Carmes ; tous les Monasteres sont dans la Plaine. Je ne crois pas que la place fût tenable autre part, puisque tout le terrein de l’Ararat est mouvant ou couvert de neige. Il semble même que cette Montagne se consomme tous les jours.

Du haut du grand abîme, qui est une ravine épouventable, s’il y en eut jamais, et qui répond au village d’où nous êtions partis, se détachent à tous momens des rochers qui font un bruit effroyable, et ces rochers sont