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du pays, avec des frizes de fleurs qui sont d’un assez mauvais goût, de même que les tableaux d’histoire, dont les figures sont mal dessinées, mal colorées, et encore plus mal groupées. Les Persans, quoique Mahometans, se servent de tableaux, et l’on peint à fresque dans Teflis sur le plâtre gaché, d’une maniére qui n’est pas desagréable. Le plâtre y est fort commun, aussi-bien que le bois, quoiqu’on y brûle ordinairement de la bouze de vache. On croit qu’il y a environ vingt mille âmes dans la ville, sçavoir quatorze mille Armeniens, trois mille Mahometans, deux mille Georgiens et cinq cens Catholiques Romains. Ces derniers sont des Armeniens convertis, ennemis déclarez des autres Armeniens ; les Capucins Italiens n’ont jamais pu les réconcilier ensemble.

Nous logeâmes chez ces bons Peres qui sont fort aimez en Georgie où ils sont les medecins des corps et des âmes. Ils n’y manquent pas d’occupation, car ils ne sont que trois, c’est à dire deux Peres et un Frere. La Congrégation de la Propaganda ne leur donne presentement que 25 écus romains par teste, qui valent cent livres de France ; mais on leur permet d’exercer la Medecine, laquelle on suppose qu’ils savent, quoique pourtant ils n’en ayent que de tres legers principes. Si le malade meurt, ou s’il ne guerit pas, les Medecins ne sont point payez ; s’il guerit, ce qui arrive par hasard, on envoye du vin au Couvent, des vaches, des esclaves, des moutons, etc. Leur Couvent est joli ; ils y reçoivent presque tous les Francs qui passent par Teflis, et leur hospice appartient aux P. Capucins de la Romagne. Le Superieur de la Maison prend la qualité de Prefet des Missions de Georgie. Les Theatins qui êtoient dans la Colchide ou Mengrelie recevoient de la même Congrégation cent écus par teste, et ils étoient devenus Seigneurs d’une ville. Il n’y a plus