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passâmes par des vallées fort seches et toutes découvertes. On campa sur les neuf heures au dessous de Baibout dans la plaine, le long d’une petite riviere. Baibout est une petite ville tres forte par sa situation sur une roche fort escarpée. On fit courir le bruit que le Pacha y séjourneroit cinq ou six jours pour tenir les Grands-jours, et l’on y amena des prisonniers de plusieurs endroits ; ainsi nous passâmes le reste de la journée à courir pour chercher des Plantes ; mais nous fûmes trompez, car il fallut partir un jour aprés sans pouvoir monter à la ville. Peut-être que nous y aurions trouvé quelques restes d’antiquité, ou quelques inscriptions qui nous eussent fait connoître son ancien nom. Suivant sa situation, elle paroit marquée dans nos Cartes sous le nom de Leontopolis et Justinianopolis, qui avoit eté nommée Byzane ou Bazane. Nous fûmes aussi surpris que chagrins d’entendre la chamade qui nous avertissoit qu’il falloit monter à cheval. Voici une des plus belles Plantes qui naisse autour de Baibout, et qui ne contribua pas peu à nous consoler de nôtre départ précipité.

C’est un buisson d’un pied de hauteur seulement, mais étendu à la ronde jusques à deux ou trois pieds, touffu et tout-à-fait semblable à la Tragacantha. Ses tiges vers le bas sont grosses comme le pouce, blanches en dedans, couvertes d’une écorce noirâtre, gercées, tortuës dans la suite, divisées en plusieurs branches nuës et partagées en vieux brins épineux et secs. Les sommitez de ces brins soutiennent de jeunes jets tortus et branchus, terminez en piquants vert-pâle, garnis de feüilles rangées sur une côte longue de 9 ou 10 lignes, sur laquelle on compte ordinairement deux ou trois paires de feüilles opposées vis-à-vis, longues de 4 ou 5 lignes sur moins d’une ligne de large, pointuës par les deux bouts, un peu pliées en gou-