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Le 5 Juin nous marchâmes depuis 4 heures du matin jusques à midi à travers de grandes montagnes couvertes de Chênes, de Hestres, de Sapins ordinaires, et d’autres qui ont le fruit fort petit, dont nous avions veû de pareils dans les montagnes du Monastere de Saint Jean de Trebisonde. Nous observâmes dans nôtre route, outre le Charme commun, une autre espece beaucoup plus petite dans toutes ses parties. Ses feüilles n’ont qu’un pouce de long, et ses fruits sont tres courts. Ce Charme a levé de graine dans le Jardin du Roy, et n’a pas changé. Les especes de Chamærhododendros à fleur purpurine et à fleur jaune, se faisoient voir assez frequemment le long des ruisseaux. Nous campâmes ce jour-là dans une plaine couverte de neige, dont la terre n’avoit encore rien produit. Quoique ces montagnes soient moins hautes que les Alpes et que les Pyrenées, elles sont aussi tardives, car la neige n’y fond qu’à la fin du mois d’Aoust. Parmi plusieurs Plantes rares, nous observâmes une belle espece de Renoncule à gros bouquets de fleurs blanches.

Ses feüilles sont larges de trois ou quatre pouces, semblables par leurs découpures à celles de l’Aconit Tüeloup, vert gai, lisses, veinées proprement, parsemées de poils sur les bords et en dessous, soutenuës par un pedicule long de 4 ou 5 pouces, vert pâle, velu, épais de deux lignes, assez rond, fistuleux, large de 4 lignes à sa base, où il est plié en maniére de goutiere. La tige est d’environ un pied de haut, creuse aussi, vert pâle et veluë, épaisse d’environ deux lignes, toute nuë, si ce n’est vers le haut où elle soutient un bouquet de sept ou huit fleurs, entouré de 4 ou 5 feüilles, longues seulement de deux pouces ou deux pouces et demi sur un pouce de large, découpées en trois principales parties, et recoupées encore à peu prés comme les autres feüilles. Quoique le bouquet soit assez