Page:Tourgueniev - Premier Amour, trad. Halpérine-Kaminsky.djvu/66

Cette page a été validée par deux contributeurs.
52
PREMIER AMOUR

qui lui était propre, il s’occupait de sa voisine. Parfois il la regardait. Elle lui jetait de temps à autre un regard, mais si étrange ! on aurait presque dit haineux.

La conversation avait lieu en français. Je me souviens que ce qui me frappa, ce fut la pureté de la prononciation de Zinaïda.

La princesse ne se gênait pas plus pendant le dîner qu’avant, mangeait beaucoup et louait les mets. Sa présence pesait visiblement à ma mère, qui lui répondait avec une sorte de dédain attristé. Mon père fronçait parfois le sourcil.

Zinaïda ne plut pas non plus à ma mère.

— Comme elle est orgueilleuse ! dit-elle de la jeune fille le lendemain ; et on se demande de quoi elle peut être si fière, avec sa mine de grisette !

— Tu n’as jamais vu probablement de grisettes ! lui fit remarquer mon père.