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PREMIER AMOUR

une force irrésistible m’entraîna de ce côté, et ce ne fut pas en vain. À peine me trouvais-je auprès de la haie, que j’aperçus Zinaïda. Cette fois elle était seule : elle tenait entre ses mains un livre et suivait lentement le sentier. Elle ne me remarquait pas.

Je faillis la laisser passer outre. Mais tout à coup je me ravisai et je toussotai.

Elle se retourna mais ne s’arrêta pas, et, écartant de sa main le large ruban bleu de son chapeau de paille rond, elle me regarda, sourit doucement et, de nouveau, fixa ses yeux sur le livre.

J’ôtai ma casquette, et, après quelques piétinements sur place, je m’éloignai le cœur gros.

« Que suis-je pour elle ? » pensai-je, Dieu sait pourquoi, en français.

Un pas que je reconnus se fit entendre derrière moi. Je me retournai. Mon père, de