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PREMIER AMOUR

l’autre de ses fers de devant, mordait avec un petit hennissement le cou de mon cheval ; en un mot, il se conduisait comme un « pur sang » gâté.

Mon père ne revenait pas. Une fraîcheur désagréable montait de la rivière. Une fine pluie commençait à tomber doucement et bigarrait de petites taches sombres les grandes poutres bêtes et grises autour desquelles je tournais et qui commençaient à m’agacer.

L’ennui me prenait et mon père ne revenait toujours pas. Un sergent de ville d’origine finnoise, tout gris lui aussi, avec un vieux shako, en forme de pot, et une hallebarde (à quel propos un sergent de ville se trouvait-il en cet endroit ?) s’approcha de moi, et en tournant vers moi son visage ratatiné de vieille femme, me dit :

— Que faites-vous ici avec ces chevaux,