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PREMIER AMOUR

m’attendais, d’un instant à l’autre, à voir éclater la foudre.

Je m’étais habitué à beaucoup de choses chez les Zassékine : leur désordre, leurs chandelles dans le salon, les couteaux et les fourchettes cassés, les brusqueries de Vonifati, les vêtements sales des femmes de chambre, la tenue de la vieille princesse, toute cette irrégularité de vie ne me frappait plus… Mais je ne pouvais pas me faire à ce quelque chose d’indéfinissable que je sentais dans Zinaïda. « Aventurière », disait d’elle, une fois, ma mère ! « Aventurière », elle ! mon idole ! ma divinité ! Cette épithète me brûlait. Je cachais ma tête dans le coussin pour fuir cette idée : j’étais indigné et en même temps, que n’aurais-je pas fait, à quoi ne me serais-je pas résigné pour être à la place de cet heureux, à la fontaine !…

Mon sang bouillonnait, et, de nouveau, mon