Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.

fut impossible de ne point répondre par un sourire.

— Ton enfant est superbe, dit-il en regardant à sa montre. J’étais entré ici pour parler du thé…

Paul reprit l’air indifférent qui lui était habituel et sortit immédiatement de la chambre.

— Il est venu de lui-même ? demanda Kirsanof à Fénitchka.

— Oui, il a frappé et il est entré.

— Et Arkacha ? il n’est plus revenu te voir ?

— Non. Peut-être serait-il mieux que je retourne dans mon ancien logement, Nicolas Petrovitch ?

— Pourquoi cela ?

— Je crois que cela serait bon pour quelque temps.

— Mais… non, lui répondit Kirsanof avec hésitation. C’est trop tard, dans tous les cas… Bonjour, mon gros, continua-t-il avec une subite animation ; et, se rapprochant de l’enfant, il le baisa sur la joue ; puis il se pencha davantage et appuya les lèvres sur la main avec laquelle Fénitchka tenait Mitia, et qui, blanche comme du lait, se détachait sur la chemise rouge de l’enfant.

— Nicolas Petrovitch ! que faites-vous ? murmura la jeune femme, et elle baissa les yeux ; puis elle les releva peu à peu… L’expression de ses yeux était charmante quand elle vous regardait un peu en dessous tout en riant d’un air naïf et caressant.

Voici comment Kirsanof avait fait la connaissance de Fénitchka. Trois ans auparavant, il fut obligé de passer la nuit dans une petite ville de province assez