momille, la mélisse, la menthe et enfin une odeur de vernis, car le plancher était nouvellement peint. Le long des murs se trouvaient des chaises dont le dos était en forme de lyre ; elles avaient été prises en Pologne par le défunt général pendant sa dernière campagne. Au fond de la pièce s’élevait un lit aux rideaux d’indienne, à côté d’un coffre cerclé de fer et dont le dessus était arrondi. Dans l’angle opposé une lampe en cuivre brûlait devant une grande et sombre image de saint Nicolas ; un petit œuf de porcelaine attaché à un ruban rouge passé autour de l’auréole de l’image pendait sur la poitrine du saint ; sur l’appui des fenêtres étaient rangés des pots de confitures préparées l’année précédente et fermés avec soin ; Fénitchka avait écrit de sa main en gros caractères sur le papier qui les couvrait : « casisse. » Kirsanof préférait ces confitures à toutes autres. Du plafond descendait, attachée à une longue corde, une cage dans laquelle se voyait un serin vert à la queue écourtée ; l’oiseau criait et sautait sans cesse, et imprimait à la cage un balancement saccadé ; des grains de chènevis tombaient avec un léger bruit sur le plancher. Entre les deux fenêtres, au-dessus d’une commode, pendaient au mur plusieurs photographies de Kirsanof dans différentes poses ; elles avaient été faites par un artiste de passage. À côté se voyait également une photographie de Fénitchka elle-même ; une figure sans yeux et souriant d’un air contraint s’y détachait sur un fond noir ; c’était là tout ce qu’on pouvait distinguer. Au-dessus de ce dernier portrait, le général
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