Paul fronça les sourcils d’un air sévère, et Kirsanof était tout confus.
— Bonjour, Fénitchka, dit-il enfin entre ses dents.
— Bonjour, répondit-elle d’une voix basse et douce ; et elle se retira lentement après avoir jeté à la dérobée un regard sur Arcade, qui lui souriait d’un air amical… Elle se balançait un peu sur ses hanches en marchant ; mais cela lui allait bien.
Lorsqu’elle fut partie, un profond silence régna pendant quelques instants sur la terrasse. Paul buvait son cacao ; il leva lentement la tête :
— Voilà monsieur le nihiliste qui daigne venir nous trouver, dit-il à demi-voix. Effectivement Bazarof s’avançait dans le jardin, en passant par-dessus les plates-bandes. Son paletot et son pantalon de toile étaient crottés ; une plante de marais serpentait autour de son vieux chapeau rond. Il tenait un petit sac de la main droite ; quelque chose y remuait. Il s’approcha à grands pas de la terrasse, inclina un peu la tête et dit :
— Bonjour, messieurs, vous me pardonnerez si j’arrive un peu tard pour le thé. Je vais revenir ; il faut que je me débarrasse de ces prisonniers.
— Ce sont des sangsues ? lui dit Paul.
— Non, des grenouilles.
— Est-ce pour les manger ou pour les élever ?
— Elles me servent à faire des expériences, répondit Bazarof d’un air indifférent ; et il entra dans la maison.